« Call me by your name » et les romances gay (plus réussies) qui l’ont précédé

« Call me by your name » et les romances gay (plus réussies) qui l’ont précédé

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Il y a eu bien des romances gay à l’écran avant Call me by your name. Porté par la rumeur, le film de Luca Guadagnino est pourtant parfois présenté comme le grand fim d’amour gay qu’on attendait. Est-ce vraiment le cas ?

Un joli adolescent tombe amoureux d’un bel étudiant un peu plus âgé dans un cadre idyllique… Le pitch de Call me by your name n’est pas d’une originalité folle. Pourtant, cette romance gay n’en finit pas de faire chavirer les cœurs à travers le monde, portée par le charme du jeune Timothée Chalamet, acteur mi-français mi-américain qui se retrouve, à la surprise générale, en lice pour les Oscars face à Daniel Day-Lewis ou Denzel Washington.

Le film de Luca Guadagnino, adapté par James Ivory d’un beau roman sensible d’André Aciman, raconte ainsi le coup de foudre immédiat d’Elio pour Oliver, l’étudiant en archéologie que sa famille accueille pour l’été dans sa grande villa italienne, et ses tentatives de séduction longtemps repoussées jusqu’au moment où… Le film chronique ainsi cet éveil des sens d’Elio, ses audaces pour parvenir à ses fins, mais aussi l’abandon progressif d’Oliver, le tout dans un environnement privilégié et ultra protégé, dans lequel les échos du monde et de ses tourments ne parviennent jamais, et sous la protection bienveillante des parents très compréhensifs d’Elio. Le père du garçon, en particulier, regarde avec tendresse, et sans doute un peu de regret, ce qui s’ébauche sous ses yeux, l’amenant à faire à son fils une vibrante déclaration qui reste l’un des moments clés de Call me…

Un film assez platement réalisé

Si la romance est charmante et touchante, on a, il faut bien l’avouer, un peu de mal à voir dans ce film assez platement réalisé le chef-d’œuvre vanté un peu partout. Ce n’est en tout cas ni le « nouveau Brokeback Mountain » annoncé par la publicité ni LE film d’amour gay qui ferait oublier tous les autres réalisés avant lui.

Brokeback Mountain (2005), pour rester sur lui, est à coup sûr un film bien plus essentiel sur une passion homosexuelle rendue impossible par l’homophobie sociale, la haine de soi et le déni qu’elle induit, et qui ne parvient donc à exister que par pulsions, dans le secret. Il y a dans le film d’Ang Lee une tension bien plus forte, bien plus existentielle, palpable à l’image. De même, James Ivory, vieux routier du cinéma britannique qui avait espéré adapter lui-même Call me… avant de se contenter d’en signer le scénario, a signé il y a près de trente ans une histoire d’amour infiniment plus intense dans Maurice (1986), où un jeune aristocrate acceptait de se faire mettre au ban de la bonne société anglaise du début du XXè siècle en vivant au grand jour son amour pour un garde chasse sexy. L’indéniable et troublante dimension romantique du film était là aussi portée par une dimension politique.

On pourrait dire la même chose de My beautiful laundrette de Stephen Frears (1986) et de son lumineux couple interracial dans le Londres des années Thatcher, le jeune pakistanais ambitieux et le punk blond faisant front ensemble pour s’aimer face à l’adversité. Ou de Beautiful thing (Hettie MacDonald, 1996), la si bouleversante romance entre deux ados défavorisés d’une banlieue anglaise. Ou de Moonlight (Barry Jenkins, 2016), Oscar du meilleur film l’an dernier, où un jeune noir américain devait apprendre à s’accepter malgré les haines alentours, pour être capable de dire et de vivre son amour. La liste serait longue, et passerait évidemment par Israël et la romance entre militaires de Yossi et Jagger (Eytan Fox, 2002).

Moonlight

Même une comédie débridée comme I love you, Phillip Morris (Glenn Ficarra, John Requa, 2009) proposait une dramaturgie un peu plus tendue pour raconter son histoire d’amour entre un flic devenu arnaqueur et le prisonnier dont il est fou de désir.

Est-ce à dire qu’il faut absolument sous-tendre une romance d’un conflit, ou d’une difficulté quelconque pour la rendre vibrante ? Sans doute, et sans doute est-ce là l’une des faiblesses de Call me by your name : rien ne s’oppose à ce qui s’apprête à arriver entre Elio et Oliver, à part les faibles objections de ce dernier.

Cela rend l’histoire, déjà desservie par une réalisation atone, un peu fade, à l’image de l’interprète d’Oliver, Armie Hammer, qui a bien du mal à imprimer la pellicule. Mais peut-être est-ce le coup de génie du film, ce qui touche tant de spectateurs : faire de l’objet de convoitise d’Elio un personnage si falot, si transparent, rend ce désir universel. Ce n’est pas d’Oliver qu’Elio est amoureux : il veut juste tomber amoureux d’un garçon, il veut juste passer à l’acte, c’est de son âge, c’est ce qu’il fera. Et de la même manière qu’il s’est lancé dans cette aventure, il se relèvera de la désillusion, de la tristesse née de la fin programmée de cette idylle, la fin de l’été, le départ d’Oliver et le retour de celui-ci à sa vie d’avant… Parce que cette histoire d’amour n’en était pas vraiment une, juste une étape obligée sur le chemin de l’âge adulte…

Si tel est le cas, Call me by your name échappe en partie à l’académisme qui caractérise son écriture et sa mise en scène. Sinon…

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