Expo: « Homosexuels et lesbiennes dans l’Europe nazie » au Mémorial de la Shoah
Le Mémorial de la Shoah de Paris présente en ce moment et jusqu’à l’année prochaine une exposition intitulée Homosexuels et lesbiennes dans l’Europe nazie.
C’est la première fois qu’un musée d’envergure nationale s’empare du sujet en France. La centaine de documents présentée — photos, rapports de police, lettres de dénonciations, etc. — dans une salle du troisième étage au Mémorial est le fruit d’une mobilisation militante qui a débuté à la fin des années 70, avec en France des associations comme le Mémorial de la déportation homosexuelle ou les OubliEes de la mémoire.
L’exposition a été conçue par l’historienne Florence Tamagne (autrice de Histoire de l’homosexualité en Europe (Berlin, Londres, Paris, 1919-1939) ou Mauvais genre ? Une histoire des représentations de l’homosexualité).
Le sujet des Triangles Roses est évidemment central dans cette exposition, mais, comme en témoigne le titre de l’exposition, Florence Tamagne a tenu à élargir le scope. Pour la chercheuse, il s’agit de montrer que la persécution des gays et des lesbiennes par le régime nazi n’est ni un phénomène sorti de nulle part ni une tragédie qui s’est subitement arrêtée avec la chute du Reich.
L’exposition, qui s’intéresse principalement aux situations française et allemande, s’ouvre sur une copie du code pénal allemand, ouvert à la page de l’emblématique paragraphe 175. Introduit en 1871, il n’a été aboli qu’en 1994. Entre les deux il aura servi de justification légale à la persécution de dizaines de milliers d’hommes gays. Si les poursuites au titre du paragraphe 175 connaissent un pic lors des années où les nazis sont au pouvoir, elles sont loin de s’arrêter après guerre. Des milliers d’allemands continueront à passer devant la justice chaque année jusqu’à la fin des années 60 parce qu’ils sont soupçonnés d’avoir eu des relations sexuelles avec un autre homme.
L’exposition s’intéresse aussi à la répression des lesbiennes. Si, en Allemagne, elles n’étaient pas visées directement par le paragraphe 175, des femmes ont malgré tout été victimes de persécution.
Vient ensuite le temps de la reconnaissance, qui occupe la dernière partie de l’exposition. De Josef Kohout (ci-dessous), le premier triangle rose survivant à témoigner en 1972, à Rudolf Brazda, qui fut le dernier vivant à le faire, le chemin a été long. Et s’il ne reste plus aujourd’hui de survivant de la déportation sexuelle, le travail de mémoire continue.
Homosexuels et lesbiennes dans l’Europe nazie, Mémorial de la Shoah, jusqu’au 22 février 2022, Entrée libre.