Rencontre avec Jeremy Faledam, nouveau co-président de SOS Homophobie

Rencontre avec Jeremy Faledam, nouveau co-président de SOS Homophobie

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Jeremy Faledam, 32 ans, a remplacé Joël Deumier à la co-présidence de SOS homophobie il y a quelques semaines (la co-présidente, Véronique Godet, occupe toujours le même poste).

Nous l’avons rencontré pour faire le point sur son parcours, les activités et les combats de l’association.

Quel est ton parcours militant?

Je suis arrivé à SOS homophobie il y a 5 ans, après les débats sur le mariage pour tous que j’avais suivi avec assiduité. C’est un moment qui m’a beaucoup questionné. En tant que gay, je trouvais qu’on n’était pas assez audible dans les médias. La voix que j’aurais aimé entendre à ce moment-là, je la trouvais assez peu portée. J’ai commencé à réfléchir à la manière de m’engager sur ces questions-là. Il se trouve qu’à l’époque une amie d’un ami était à SOS homophobie et la réunion de recrutement tombait quelques jours après. J’y suis donc arrivé un peu par concours de circonstance. 

Ensuite au sein de SOS, je me suis intéressé aux questions de l’adolescence, avec le site cestcommeca.net et à la commission qui traitait de lutte contre l’homophobie sur internet. Pour moi c’était deux champs importants pour lutter contre l’homophobie mais de manière positive et pour essayer de créer un contre-discours et une visibilité autre sur les questions LGBT. Au fil des années, j’ai grandi avec l’association, et j’ai fait la formation pour être écoutant. J’ai été répondant pendant 3 ans. Cela a été très enrichissant pour comprendre les manifestations concrètes de l’homophobie. Finalement quand on a vit à Paris dans un milieu sécurisant, on peut être un peu déconnecté. Être en contact avec les victimes permet de mieux appréhender comment l’homophobie se vit au quotidien. 

Enfin, j’ai voulu de plus en plus m’engager et j’ai rejoint le conseil d’administration de l’association, il y a trois ans, avant d’intégrer le bureau, où j’ai été secrétaire avant de devenir co-président. 

Récemment, on a eu l’impression d’assister une « vague » d’agressions homophobes similaire à celle qui avait marqué les esprits l’an dernier. Que peux-tu nous dire sur ce sujet? 

Cette vague qui a été très médiatisée est à la fois alarmante et préoccupante. Car ce sont des agressions qui sont nombreuses, violentes et quasi-quotidiennes. C’est assez inquiétant en tant que militant et en tant que personne LGBT à vivre au quotidien. 

Après, il y a un double phénomène. Il y a cette médiatisation qui donne un coup de projecteur sur l’homophobie en France aujourd’hui et qui permet une libération de la parole. Aujourd’hui, on constate qu’il y a plus de victimes qui osent en parler, qui osent témoigner et plus de victimes qui nous appellent. Peut-on pour autant en conclure qu’il y a une augmentation flagrante de l’homophobie en France? Il y a des manifestations plus violentes, en tout cas. Et cette libération de la parole fait que les agressions sont plus visibles, mais pas forcément plus nombreuses. 

On est dans une situation paradoxale. Puisqu’on voit que d’un côté dans la société il y a globalement une meilleure visibilité des personnes LGBT, une meilleure acceptation et de l’autre, on a ces manifestations violentes de haine et une marge de la population qui voit ce changement de société de manière très négative. 

L’an dernier, suite à cette première « vague », trois ministres étaient venus au local de l’association annoncer des mesures pour lutter contre l’homophobie. Ont-elles été mises en places? Et le cas échéant, efficaces?

Parmi les mesures qui ont été annoncées, il y en a deux ou trois qui ont été implémentées. Et d’autres qui sont en cours, comme la formation des magistrats, qui prend du temps à être mis en oeuvre. Pour nous, cela prend trop de temps. Si on veut avoir une vraie politique de lutte contre les discriminations et les agressions, il faut y mettre les moyens.

Il reste beaucoup à faire. 

Le gouvernement devrait annoncer un nouveau plan de lutte contre les LGBT-phobies à la rentrée, avec un bilan de toutes les mesures terminées et le renforcement de certaines. 

On attend ce nouveau plan avec impatience et des engagements fermes. Sur les dernières agressions, il n’y a eu aucune réaction au plus niveau de l’Etat, ce qui est pour nous assez négatif. 

Ce ne sont pas des postures que nous demandons. Il s’agit de montrer que c’est un problème qui est pris en compte, et pris au sérieux surtout de la part du chef de l’Etat. 

Parmi les soucis pour les victimes d’homophobie, il y a le problème du dépôt de plainte. Les plaintes ne sont pas toujours prises au sérieux et enregistrées. Y a-t-il du progrès de ce côté-là? 

Il y a des victimes pour qui ça se passe très bien, mais il y en a encore beaucoup pour lesquelles il y a un vrai souci. 

Le problème est en deux temps. Quand la victime arrive au commissariat, soit on ne veut pas reconnaître le caractère homophobe de son agression, soit on décourage la plainte. Donc c’est un problème et il faut former les policiers dans ce sens-là. Il y a encore une grosse marge de manoeuvre, notamment sur la mise en place des référents dans chaque commissariat, qui était une des mesures annoncées, mais le travail commence à être fait, notamment grâce à Flag!. Apparemment il y a un peu moins de 700 référents qui ont été nommés, maintenant il faut voir comment on équipe ces référents, comment on les formes, quelles missions on leur confie exactement. 

Il faut également avancer sur la perception que les victimes ont de ce dépôt de plainte. Aujourd’hui, il y une majorité de victimes des LGBT-phobies qui ne pensent même pas aller à au commissariat pour porter plainte. Là aussi il y a un enjeu en termes de pédagogie auprès des victimes. 

Autre sujet sur lequel l’association est engagée, la PMA…

On avance enfin! Mais on est très vigilant sur la manière dont sont menés les débats. Nous avons d’ailleurs fait un courrier au CSA pour lui demander d’être vigilant par rapport à ça, sachant que nous ne voulons pas revivre ce qui s’est passé au moment du mariage pour tous. C’est un sujet que nous abordons avec tous les parlementaires que nous rencontrons. Les débats vont se tenir dans un contexte où l’homophobie est encore très présente en France et il faut l’avoir en tête quand on sait qu’on va discuter de familles homoparentales et de personnes LGBT pour ne pas attiser des haines ou apporter de la confusion à un sujet qui est finalement très simple: il s’agit de donner accès à un nouveau public à des droits qui existent déjà. C’est une démarche d’égalité pure et simple. 

Quelle est la position de SOS Homophobie sur la GPA? 

Nous ne sommes pas positionnés sur le GPA, dans la mesure où elle n’est pas ouverte pour les hétérosexuels. Nous sommes sur des sujets de discrimination. Tant qu’elle n’est ouverte à personne, nous n’avons pas de position. Si demain, il est décidé de l’ouvrir, on sera pour qu’elle soit ouverte à tout le monde, si jamais on prend position. Par contre, pour ce qui est de la reconnaissance des enfants nés par GPA à l’étranger et l’établissement de leur filiation, notre position est que tous les enfants de toutes les familles doivent obtenir une sécurisation et les mêmes droits.

Photos: Jeremy Guetté

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