Et le mariage pour tous revient dans le débat national… Pour mieux couler la PMA?

Et le mariage pour tous revient dans le débat national… Pour mieux couler la PMA?

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Si les militants LGBT craignaient de revivre les débats du mariage pour tous avec le débat sur la PMA, ils et elles n’avaient sans doute pas pensé revivre les débats du mariage pour tous avec… un nouveau débat sur le mariage pour tous. C’est pourtant une hypothèse qui se dessine peu à peu suite au mouvement des gilets jaunes. Comment en est-on arrivé là? Récit d’une tragédie en trois actes.

Acte I – La petite phrase d’Alexis Corbière

Le 18 décembre dernier, alors que l’on parle de plus en plus de l’une des revendications des gilets jaunes, le Référendum d’initiative citoyenne (RIC), le député France Insoumise Alexis Corbière estime sur la chaîne LCP que l’on pourrait tout à fait avoir un référendum sur la question du mariage pour tous — dont il est partisan —, ce qui permettrait selon lui de le « relégitimer ».

Une position qu’a semblé exprimer le nouveau chef du Parti communiste Fabien Roussel sur BFMTV ce matin:

Le député a ensuite précisé sur Twitter que « Le RIC doit permettre de gagner des droits nouveaux, pas de mettre en cause des droits fondamentaux ». Dont acte, mais s’il y a besoin de préciser c’est que le sujet n’est pas très clair de prime abord…

Acte II – La manif pour tous investit la consultation du CESE

Suite au mouvement des gilets jaunes, le Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) proposait du 15 décembre au 4 janvier aux citoyen.ne.s — gilets jaunes ou non — de formuler des propositions et de les voter autour de six thématiques:  » inégalités sociales », « justice fiscale », « inégalités territoriales », « pouvoir d’achat », « participation des citoyens » et « transition écologique ».

A la clôture de la consultation, on peut constater que les 9000 propositions déposées ont recueilli plus de 260 000 votes, pour environ 31 000 participants. Et quelle proposition arrive en tête? L’abrogation de la Loi Taubira, portée par le collectif « On ne lâche rien », l’une des phrases préférées de la Manif pour tous. L’association anti-LGBT et ses militants ont en effet profité de l’occasion pour essayer de mettre un peu de bleu et de rose dans le jaune. Même Frigide Barjot y est allée de sa contribution, comme le rapporte Arrêt sur Images.

Sollicité sur ces résultats, le CESE répond à Têtu, qu’ils ne sont « pas dupes » et qu’ »ils tiendront compte » des « agissements » de la Manif pour tous et consorts.

Deux membres du gouvernement réagissent également.

Sur Twitter, la secrétaire d’Etat à l’égalité femmes-hommes et à la lutte contre les discriminations, Marlène Schiappa commente: « Not on my watch »: « Pas tant que je suis là ».

De son côté, sur LCI, le ministre Mounir Mahjoubi, secrétaire d’Etat au numérique — et ouvertement gay —  critique cette consultation, la décrivant comme « une bonne pratique de ce qu’il ne faut pas faire ».

Les contributions des citoyen.ne.s serviront de base à un futur avis — consultatif — du Conseil: «Sur la base des résultats de cette consultation, mais aussi d’auditions et de la consultation de citoyens tirés au sort, un avis sera élaboré et présenté au vote en mars 2019, afin d’apporter une réponse globale aux enjeux révélés par le mouvement des « gilets jaunes » et s’inscrire dans le débat national », précise le CESE, cité par 20 minutes.

Acte III – Un « grand débat national » phagocyté?

Le grand débat national, voulu par Emmanuel Macron pour répondre à la crise des gilets jaunes doit débuter le 15 janvier. Sa présidente, Chantal Jouanno, a donné une interview sur Europe 1, qui n’est pas passé inaperçue. L’ancienne ministre Chantal Jouanno y a affirmé en effet qu’elle n’excluait pas de débattre sur le mariage pour tous: « Peut-être que nos concitoyens voudront le faire. Nous n’interdisons aucun thème. C’est ensuite au gouvernement de décider ce qu’il en fera ».

Réaction vive du président de SOS homophobie, pour qui « on ne débat pas des droits humains consacrés ».

Joël Deumier est loin d’être le seul à réagir, ce qui pousse Chantal Jouanno à préciser qu’elle n’a tout simplement pas le pouvoir de « censurer les sujets ».

La porte est donc grande ouverte pour les anti-PMA et les anti-mariage pour tous, qui vont pouvoir à nouveau phagocyter les débats comme ils l’ont fait lors des débats autour de la révision des lois bioéthiques.

Officiellement, les débats doivent s’articuler autour de quatre grands thèmes: la transition écologique, la fiscalité et les dépenses publiques, la démocratie et la citoyenneté (dont l’immigration) et l’organisation de l’État et des services publics. Mais rien n’empêche qui que ce soit d’organiser des débats sur d’autres sujets.

En décembre, Ludovine de la Rochère et les militant.e.s de la Manif pour tous ont fait la « tournée des ronds points » pour tenter de mobiliser les gilets jaunes sur leurs sujets, comme le rapporte le journal La Croix. Mais la présidente du mouvement homophobe reconnaît elle-même que  «  le sujet de la PMA est très loin d’être prioritaire » chez les manifestant.e.s. La tentative de détourner les débats fera-t-elle « pschiiit »? Ou la Manif pour tous va-t-elle réitérer le coup de 2013: mobiliser à fond contre le mariage pour obtenir l’annulation de la PMA? Quoi qu’il en soit, tous les éléments d’une tragédie, non pas grecque, mais bien française, sont en train de se mettre en place lentement mais sûrement.

 

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